In situ

La réalité du paysage est étroitement liée à la lumière qui lui donne corps.

Les impressionnistes au XIXème observent le réel, analysent l’impression lumineuse de leur propre regard. Les peintres ne peignent plus la chose mais l’effet qu’elle produit sur l’œil.
Cézanne parle de l’impressionnisme comme une peinture de l’œil en déclarant : « Monet est un œil …mais quel œil… ».

« In situ » est un travail photographique réalisé à la manière d’une peinture de l’œil qui retranscrit la vie, un regard en série sur les côtes normandes.
Les images sont mises en relation les unes avec les autres et déclinent leurs palettes de couleurs.
L’inspiration est instinctive, fixer la lumière dans l’instant et dans l’espace.
Un instant d’hiver ou de printemps…de pluie…de hautes marées…entre chien et loup…saisir cette nature qui un jour se révèle bleu puis le lendemain grise.
Quand le vent accroche les falaises et que les hommes se courbent.

Les impressionnistes n’organisent plus leur toile par la perspective mais par la lumière et la mise à plat de la peinture car l’idée de profondeur existe grâce à l’agencement des tâches de couleurs.
Les peintres sont sensibles à la science : les théories de Chevreul en 1839 sur la couleur et sa complémentaire, les traités sur l’optique mais ils sont également attentifs aux applications de la photographie.
L’image  « impressionne » directement la plaque  photographique, de l’objet au plan sans reconstruction. Les impressionnistes font aussi l’impasse de cette reconstruction et utilisent instantanément le jeu de lumière sur le plan de la toile.

Dans les séries de l’exposition « In situ », les images parfois se diluent pour mettre en avant la place de la lumière et souligner la matière, la forme pour ne garder que l’impression que fait sur l’œil les lumières diffusées par le paysage.

Si la nature n’a aucune imagination comme le dit Baudelaire, il ne reste plus qu’à s’imprégner de cette nature, de ses formes pour la décliner autrement : pour les impressionnistes en peignant des « arbres en bleus », pour la photographie  dans l’immédiateté.
Isabelle Lebon / Photographe